Section I > Chapitre II > C. Attaques contre les autres populations civiles > 10. Bas-Congo
303. Sous le régime du Président Mobutu et jusqu’à sa chute, en mai 1997, les différents services de sécurité zaïrois, en particulier la Garde civile, ont commis de nombreuses exactions, dont notamment des viols, et torturé de nombreux civils en toute impunité. Un cas illustratif a été jugé par la Cour de district de Rotterdam (Pays-Bas).
- En octobre 1996, à Matadi, le commandant de la Garde civile, le colonel Sébastien Nzapali, surnommé le « Roi des bêtes » en raison de sa brutalité légendaire, a fait torturer un agent de la douane travaillant au port de Matadi. Le 7 avril 2004, le colonel Nzapali a été condamné pour ces faits à deux ans et demi de prison par la Cour de district de Rotterdam (Pays-Bas). Nzapali vivait aux Pays-Bas depuis 1998 mais avait été débouté de sa demande d’asile politique458.
304. À compter du début de 1997, le Gouvernement angolais a pris contact avec les autorités rwandaises et ougandaises et a apporté son soutien à l’opération de l’AFDL/APR/UPDF visant à éliminer du pouvoir le Président Mobutu. Les militaires des Forces armées angolaises (FAA) ont profité de leur présence à Kinshasa aux côtés des troupes de l’AFDL/APR/UPDF pour renforcer leur répression à l’encontre des populations cabindaises réfugiées dans la province du Bas-Congo. L’incident allégué suivant a été documenté :
- À compter de juin 1997, dans le district du Bas-Fleuve de la province du Bas-Congo, des éléments des FAA ont arrêté et fait disparaître un nombre indéterminé de réfugiés originaires du Cabinda. Au cours de 1998, les FAA ont installé un centre opérationnel à Tshela d’où elles ont mené plusieurs opérations de répression. Les forces de sécurité congolaises ont aussi arrêté plusieurs ressortissants cabindais accusés de visées séparatistes et les ont transférés dans divers lieux de détention à Kinshasa459.
305. Fin mai 1997, après la prise de Kinshasa, les militaires de l’AFDL/APR sont arrivés dans la province du Bas-Congo. Ils auraient alors infligé en public à un grand nombre de civils des peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants pour des faits souvent bénins. Plusieurs personnes ayant subi le supplice de la chicotte ont succombé à la suite des hémorragies internes provoquées par les coups de fouet donnés sur l’abdomen460.
306. Les militaires de l’AFDL/APR ont également violé un grand nombre de femmes. À titre d’exemple, l’Équipe Mapping a pu documenter les cas allégués suivants :
- À compter de juin 1997, dans le camp Lisanga (Missioni) de Matadi, des éléments de l’AFDL/APR devenus FAC/APR ont violé un nombre indéterminé d’épouses de militaires des ex-FAZ restées seules du fait que leurs maris avaient été envoyés au centre militaire de Kitona pour y être « rééduqués ». Ils en ont forcé un grand nombre à effectuer pour eux des tâches domestiques461.
- Au cours de la même période, des éléments des FAC/APR/UPDF ont également violé plusieurs femmes au camp militaire Redjaf de Matadi462.
Après la prise de pouvoir par le Président Laurent Désiré Kabila, entre 35 000 et 45 000 militaires des FAZ en provenance de tout le pays ont été envoyés au centre militaire de Kitona, dans la ville de Moanda, afin d’y être « rééduqués ». Ce centre ne possédait qu’une capacité d’accueil d’environ 10 000 personnes et était dans un état de délabrement avancé. Dans ce contexte, l’Équipe Mapping a documenté les cas allégués suivants :
- À compter de juin 1997, les ex-FAZ présents sur la base de Kitona ont été soumis à des conditions propres à entraîner de lourdes pertes en vies humaines, notamment en raison du manque de nourriture, de l’insalubrité et du manque d’accès à des soins médicaux adéquats. Des éléments des FAC/APR ont exécuté sommairement plusieurs militaires des ex-FAZ. Ils en ont soumis d’autres à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, comme des coups de fouet ou des tortures en public. Le nombre total de morts est difficile à déterminer mais de nombreux témoins ont affirmé qu’au cours des deux premiers mois de fonctionnement du centre de Kitona, entre 5 et 10 personnes mourraient chaque jour463.
- En juillet 1997, des éléments des FAC/APR ont exécuté clandestinement des soldats des ex-FAZ qui s’étaient révoltés pour protester contre les conditions de vie qui leur étaient infligées sur la base de Kitona. À compter d’octobre 1997, les conditions de vie sur la base se sont améliorées, les soldats commençant à percevoir leurs soldes464.
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