Section I > Chapitre III. Deuxième Guerre > B. Attaques contre les autres populations civiles > 9. Katanga
374. Au cours du second semestre de 1998, les troupes de l’ANC/APR ont lancé une offensive pour prendre le contrôle du Nord-Katanga. Le 26 août, elles ont pris le contrôle de la ville de Kalemie, dans le district de Tanganyika. Une semaine plus tard, des éléments des FAC et des groupes de « Volontaires 628 » ont lancé, en vain, une contre-attaque. L’incident allégué suivant a été documenté :
- Le 3 septembre 1998, au cours de leur attaque sur Kalemie, des éléments des FAC et des « Volontaires » ont exécuté sommairement une quinzaine de militaires hors de combat de l’ANC/APR. Six d’entre eux ont été brûlés vifs en pleine rue. Les FAC ont également tué six soldats de l’ANC/APR en traitement à l’Hôpital général de Kalemie ainsi qu’un membre du personnel sanitaire (infirmier). Au cours des affrontements, un nombre indéterminé de civils ont trouvé la mort, pour la plupart victimes de balles perdues629.
375. Les troupes de l’ANC/APR ont repris Kalemie le 4 septembre 1998 et ont mené des opérations de ratissage pendant deux jours. L’incident allégué suivant a été documenté :
- À Kalemie, entre les 4 et 5 septembre 1998, des éléments de l’ANC/APR ont arrêté plusieurs dizaines d’hommes, parmi lesquels des « Volontaires » ayant déposé les armes et des civils non combattants. Certains d’entre eux ont été tués sur-le-champ en différents lieux de la ville, notamment aux avenues Lambo et Maila et à la paroisse catholique de Lubuye. Une soixantaine d’hommes ont été conduits dans des cachots militaires puis à la prison centrale. Au bout de trois jours, plusieurs dizaines d’entre eux ont été sortis de la prison et exécutés sommairement au niveau du pont sur la rivière Lukuga. Au total, les militaires de l’ANC/APR ont tué au moins 84 personnes630.
376. Après la reprise de Kalemie, la ville est devenue la principale base logistique de l’ANC/APR au Katanga. Au cours des mois et des années suivants, des avions de la ZDF alliée aux FAC ont bombardé la ville à plusieurs reprises. Dans ce contexte, l’Equipe Mapping a documenté les incidents allégués suivants :
- De 1998 à 2003, des militaires de la ZDF ont mené plusieurs raids sur la ville de Kalemie, causant la mort d’au moins 25 civils et en blessant 13. Les raids ont aussi détruit de nombreux bâtiments631.
- En décembre 1998, des éléments de l’ANC/APR ont exécuté sommairement cinq civils dans le village de Kasenga, dans la collectivité de Manda du territoire de Moba. Les victimes étaient accusées de collaborer avec les FAC basées dans la chefferie de Mutumbala. Trois corps ont été jetés dans une fosse. Avant de partir, les militaires ont incendié plusieurs centaines de maisons et détruit des biens appartenant aux civils632.
- Le 27 janvier 1999, trois avions et un hélicoptère de la ZDF ont largué plusieurs bombes sur la ville de Nyunzu, tuant au moins 14 civils et en blessant un nombre indéterminé. Ces bombardements, qui visaient les positions de l’ANC/APR, ont aussi détruit de nombreux biens civils633.
377. À compter de février 1999, l’ANC/APR a lancé une grande offensive afin de prendre le contrôle des territoires de Kongolo, Kabalo, Moba, Nyunzu, Manono et Malemba Nkulu. Dans l’espoir de bloquer leur progression, le Président Kabila a acheminé sur le terrain des ex-FAR/Interahamwe et des combattants hutu regroupés au sein de l’ALiR afin d’appuyer les militaires des FAC/ZDF/FDD déjà engagés sur le terrain. Il a également encouragé la constitution, à travers tout le Katanga, de milices d’autodéfense civile ou Forces d’autodéfense populaires (FAP) qui, dans les campagnes, ont pris la forme de groupes Mayi-Mayi sur le modèle de ceux opérant au Nord-Kivu et au Sud-Kivu. Au cours de la période considérée, la population du nord et du centre du Katanga a été prise en otage par les différents groupes armés. Les troupes de l’ANC/APR, et sur une moindre échelle, celles de l’ALiR, des FDD et des Mayi-Mayi ont massacré systématiquement les civils soupçonnés de collaborer avec leurs ennemis respectifs. Dans ce contexte, l’Equipe Mapping a documenté les incidents allégués suivants :
Territoire de Kabalo
- Le 2 février 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué entre neuf et onze civils, dont des enfants, dans le village de Kadimbu-Tambo de la collectivité de Luela-Luvunguyi, à 20 kilomètres de Kabalo. Avant de quitter le village, ils ont brûlé plusieurs maisons. Les militaires avaient accusé les habitants de collaborer avec les Mayi-Mayi.634
- Début avril 1999, des éléments de l’ANC/APR basés à Kabalo ont massacré au moins 28 civils dans les villages de Kalanda, Kahompwa et Kakuyu, à 95 kilomètres de Kabalo. À Kalanda, ils ont tué plusieurs civils dont le chef de localité de Kahompwa. Les habitants de Kalanda et Kahompwa qui ont pu s’enfuir ont trouvé refuge à Kakuyu où étaient stationnés des militaires des FAC/ZDF. Le 4 avril, cependant, les FAC/ZDF ont fui et les éléments de l’ANC/APR sont entrés dans le village et ont tué les habitants en les accusant « d’être des Luba et des frères du Président Kabila »635.
- À compter du 4 avril 1999 et au cours des deux semaines suivantes, des éléments de l’ANC/APR ont massacré plus d’une quarantaine de civils, dont des femmes et des enfants, dans les villages de Ngoma, Kabamba, Pofu, Lwama, Rudisha, Mukila, Kiluwe, Kabambale et Ndala du groupement de Munga, dans le territoire de Kabalo. Un cas de viol et des cas de mutilation corporelle ont également été rapportés. Les militaires se sont également livrés à des pillages et ont détruit de nombreux biens civils. Les victimes étaient accusées d’avoir aidé le groupe des Mayi-Mayi de Mufu 3636.
- Le 1er juin 1999, des éléments de l’ANC/APR ont massacré au moins 23 civils dans le village de Mbayo de la chefferie de Luela Luvunguyi, dans le territoire de Kabalo. Les victimes étaient parties acheter des vivres en zone gouvernementale. Les militaires de l’ANC/APR les ont pris en embuscade et les ont accusées de collaborer avec les FAC basées dans le village de Nguena. Après les avoir soumises à un interrogatoire, ils les ont tués par balle ou à coups de marteau avant de jeter leurs corps dans une fosse commune. Il semble que les éléments de l’ANC/APR opérant dans la région de Mbayo aient commis à de nombreuses reprises ce type de violations contre les civils637.
- En juin 1999, des éléments des FAC ont tué plus d’une cinquantaine de civils dans le village de Kitule et sa région, dans le secteur de Lukuswa du territoire de Kabalo. Le village avait été pendant plusieurs mois sous le contrôle de l’ANC/APR. Lorsqu’ils ont repris le village, les FAC ont tué au moins 41 civils, parmi lesquels des représentants du RCD-Goma et leur famille. Les FAC ont ensuite obligé une quarantaine de civils à transporter les biens pillés à Kitule jusqu’au village de Kyoto. Une dizaine de ces civils ont pu s’enfuir mais les autres sont portés disparus depuis lors638.
- En juillet 1999, des éléments de l’ANC/APR basés à Boya ont tué au moins 15 civils, dans le village de Kabango de la collectivité de Lwena Luvunguyi, dans le territoire de Kabalo. Ils ont également pillé les biens civils et incendié le village. Les victimes ont été arrêtées alors qu’elles tentaient de rentrer chez elles après avoir fui Kabango deux jours plus tôt à la suite d’une attaque des FAC contre leur village. Les victimes étaient accusées d’espionner pour le compte des FAC639.
- Un dimanche de l’an 2000640, des éléments de l’ANC/APR ont exécuté sommairement au moins 11 civils sur le bord de la route entre Kabalo et Kakuyu, dans le territoire de Kabalo. Les victimes étaient originaires du village de Mulonga de la collectivité de Luela-Luvunguyi, dans le territoire de Kabalo. Les militaires étaient à la recherche des FAC qui avaient posé une mine sur la route nationale et causé la mort de plusieurs de leurs camarades. À Mulonga, les militaires de l’ANC/APR ont rassemblé la population et ont arrêté 12 jeunes hommes dont la coupe de cheveux ou les marques de fusil sur les épaules donnaient à penser qu’ils étaient des militaires des FAC. Ils les ont ensuite forcés à les suivre sur plus de 20 kilomètres avant d’en tuer 11 (l’un d’eux a réussi s’échapper). Les corps des victimes ont été jetés dans une fosse commune au bord de la route641.
Territoire de Moba
- Le 4 mars 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué 84 civils dans le village de Lyapenda de la collectivité de Manda, dans le territoire de Moba. Accusées d’avoir collaboré avec les FAC qui contrôlaient jusqu’alors le village, les victimes ont été enfermées dans deux maisons puis brûlées vives. Celles qui ont tenté de s’enfuir ont été tuées par balle642.
- Le 4 juin 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué au moins 22 civils dans le village de Katwe du groupement de Kapungo, dans le territoire de Moba. Les victimes ont été enfermées dans une maison puis brûlées vives. Les militaires ont aussi commis des viols. L’attaque sur Katwe a eu lieu après qu’un officier de l’ANC/APR eut été blessé par l’explosion d’une mine sur l’axe Nyembe-Pepa643.
- Le 3 juillet 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué 48 civils dans le village de Mazembe de la collectivité de Manda, dans le territoire de Moba. Le massacre a eu lieu après qu’un véhicule transportant des troupes de l’ANC/APR eut sauté sur une mine non loin du village de Lyapenda. Ayant accusé les civils présents de donner des informations aux FAC et aux FDD opérant dans la région, les militaires de l’ANC/APR les ont enfermés dans des huttes et y ont mis le feu. La plupart des victimes étaient des travailleurs de la société d’élevage ELGYMA mais il y avait aussi parmi elles une dizaine d’enfants. Certaines des victimes n’ont pas été brûlées vives mais ont été tuées par balle. L’incendie provoqué par les militaires a aussi détruit les bâtiments de la société ELGYMA644.
- En juillet 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué au moins 10 civils à Katimbe, village proche de Kasanga, de la chefferie de Kayabala, dans le territoire de Moba. À leur arrivée dans le village, les militaires ont rassemblé les civils et les ont accusés d’aider les FAC en leur fournissant des vivres. Ils ont tué par balle ceux qui tentaient de s’enfuir et ont ensuite rassemblé des civils dans une maison et y ont mis le feu. Le village a été totalement incendié.645
Kongolo
- Entre mars et novembre 1999, dans le village de Sola, à 30 kilomètres au nord de Kongolo et ses alentours, des Mayi-Mayi ont tué au moins huit civils. En mars, les Mayi-Mayi avaient repris le contrôle de Sola. Accusées d’avoir soutenu l’ANC/APR, les victimes ont été exécutées au terme d’une parodie de procès en présence du chef féticheur. La plupart ont été torturées et mutilées à mort devant la population. Le féticheur a utilisé certaines parties du corps (lèvres, nez, oreilles, sexe, fessier et partie du thorax) pour en faire des fétiches censés protéger les Mayi-Mayi contre les balles. Des témoins ont pu donner les noms de huit victimes, mais le nombre réel des suppliciés est probablement très supérieur646.
378. En mars 1999, les Mayi-Mayi de Mufu 3 ont réussi à reprendre pendant trois jours le contrôle de la ville de Kongolo. Au cours de leur retraite, ils se sont dispersés dans le groupement de Munga. En avril, l’ANC/APR a lancé une opération militaire dans le groupement afin de neutraliser les Mayi-Mayi. Dans ce contexte, l’Equipe Mapping a documenté les incidents allégués suivants :
- Le 21 avril 1999, des éléments de l’ANC/APR ont massacré 58 personnes, dont des civils et des Mayi-Mayi, dans le village de Kasanga de la collectivité de Mohona. Les militaires cherchaient à se rendre à Nonge où le chef Mayi-Mayi de Mufu 3 avait installé son quartier général. À leur arrivée dans la localité de Kasanga où les Mayi-Mayi de Mufu 3 disposaient d’une petite base, quelqu’unaurait tiré en l’air pour alerter les habitants. Les militaires de l’ANC/APR ont aussitôt ouvert le feu sur la population, tuant sans discrimination des Mayi-Mayi hors de combat mais aussi des civils, dont un enfant. Avant de continuer sur Nonge, des éléments de l’ANC/APR ont aussi pillé et incendié le village647.
- Le 21 avril 1999 également, des éléments de l’ANC/APR ont tué au moins 17 civils et incendié une partie du village de Nonge de la collectivité de Mohona, dans le territoire de Kongolo. Nonge abritait le quartier général de Mufu 3 mais la plupart des Mayi-Mayi avaient fui le village avant l’arrivée des militaires648.
- Le 9 mai 1999, les militaires de l’ANC/APR qui venaient de Kongolo ont massacré au moins 125 civils, dont de nombreux enfants, dans le village de Tubundu, à 6 kilomètres de Makutano, dans la collectivité de Mambwe du territoire de Kongolo. Les militaires de l’ANC/APR étaient à la recherche du chef de collectivité de Mambwe qu’ils avaient accusé de collaborer avec les Mayi-Mayi. N’ayant pas trouvé ce chef, ils ont tué le chef de Tubundu, le féticheur et les membres de sa famille. Par la suite, ils ont rassemblé les civils au centre du village et ont ouvert le feu. Avant de partir, les militaires ont incendié le village. Au bout de deux semaines, les corps des victimes ont été enterrés dans des fosses communes avec l’aide de la Croix-Rouge. Le village a été reconstruit sur un autre site à proximité649.
379. À compter de mai 1999, au cours de leurs opérations contre les Mayi-Mayi de la région, les militaires de l’ANC/APR ont tué de nombreux civils dans la collectivité de Yambula, dans le territoire de Kongolo. Ils ont aussi pillé et incendié plus d’une vingtaine de villages. Dans ce contexte, l’Equipe Mapping a documenté les incidents allégués suivants :
- À Nungu, le 12 mai 1999, des éléments de l’ANC/APR ont surpris des villageois en réunion au domicile du chef de localité et ont ouvert le feu, tuant 14 civils. Les victimes étaient accusées de s’être réunies pour aider les Mayi-Mayi. En mai, les militaires ont pillé et incendié les villages de Mwana Kasongo, Nungu, Kwenze, Mayenze, Tuta, Kaulo, Mwana Tambwe, Ngamba et Toileti. En novembre, ils ont tué au moins deux civils à Imba et un à Mukuko et incendié de nombreux villages parmi lesquels Imba 1, Imba 2, Imba 3, Kalawa, Mesu, Kabenge, Muti, Mukoko, Kilongo, Seba et Himba650.
- Le 23 mars 2000, des éléments de l’ANC/APR ont exécuté cinq civils à Moza Block 1, à 20 kilomètres de Kongolo. Les victimes étaient accusées de collaborer avec les Mayi-Mayi651.
- Le 23 mars 2000, des éléments de l’ANC/APR ont tué 34 civils non armés et en ont blessé un à Moza, village situé dans la collectivité de Bayashi du territoire de Kongolo. Après avoir été arrêtées par une patrouille de l’ANC/APR, les victimes ont été accusées de collaborer avec les Mayi-Mayi. Elles ont ensuite été enfermées dans une maison et brûlées vives. Celles qui ont tenté de s’échapper ont été tuées par balle, à l’exception de deux civils qui ont survécu à la tuerie652.
- Le 10 octobre 2000, des éléments de l’ANC/APR ont brûlé vifs 11 civils dans le village de Nindila, dans les environs de Sola, à 30 kilomètres au nord de Kongolo. Les victimes faisaient partie du groupe de villageois qui avaient répondu à l’appel des militaires de l’ANC/APR à se rassembler sur la place du village. Après avoir accusé les victimes de collaborer avec les Mayi-Mayi, les soldats de l’ANC/APR les ont enfermées dans une case en chaume et y ont mis le feu. Début octobre 2000, les Mayi-Mayi de Sola avaient tendu une embuscade et tué un commandant de l’ANC/APR653.
Nyunzu
380. Le territoire de Nyunzu était sous le contrôle des troupes de l’ANC/APR. À compter d’avril 1999, les Mayi-Mayi alliés à des éléments de l’ALiR ont tenté de chasser des éléments de l’ANC/APR de la collectivité du Nord-Lukuga. Dans ce contexte, l’Equipe Mapping a documenté les incidents allégués suivants :
- En avril 1999, des éléments de l’ALiR ont incendié les villages de Sulumba, Lwazi, Mpende et Mufunqwa de la collectivité du Nord–Lukuga, dans le territoire de Nyunzu. Les miliciens avaient accusé les habitants de ces villages de collaborer avec les éléments de l’ANC/APR basés à Lengwe654.
- Au cours du premier semestre de 1999, les Mayi-Mayi ont brûlé le village de Lengwe et tué sept civils à Katuko655.
- En janvier 2000, des éléments de l’ANC/APR ont tué plusieurs dizaines de civils, dont des femmes et des enfants, dans le village de Makele de la collectivité du Sud-Lukuga, dans le territoire de Nyunzu. Certaines des victimes ont été tuées par balle, d’autres à l’arme blanche et d’autres encore ont péri brûlées vives dans leurs maisons. Plusieurs de ceux qui ont tenté de s’enfuir se sont noyés en traversant la rivière Lweyeye. Les noms de 51 victimes ont pu être identifiés, parmi lesquels le chef Mayi-Mayi Kapata. Les militaires de l’ANC/APR ont aussi pillé les biens civils et incendié le village avant de se retirer. Après l’arrivée de l’ANC/APR dans la région, fin 1998, Makele avait accueilli de nombreux déplacés originaires de Mulongo et Mabilibili et servait également de base aux groupes Mayi-Mayi de la région. Au cours de leur attaque, les éléments de l’ANC/APR n’ont fait aucune distinction entre les civils et les Mayi-Mayi. Le village n’a pas été reconstruit656.
- Le 27 février 2000, des éléments de l’ANC/APR ont tué 12 pygmées (quatre civils et huit ex-Mayi-Mayi qui avaient déposé les armes) dans le village de Nyemba, à 39 kilomètres de Nyunzu, dans la collectivité du Nord-Lukuga. L’exécution a eu lieu alors que les victimes ex-Mayi-Mayi étaient en cours de transfert sur la base de l’ANC/APR à Kabeya Mayi, à 34 kilomètres de Nyunzu. Depuis longtemps ces Mayi-Mayi étaient en conflit avec l’ANC/APR et collaboraient avec les éléments de l’ALiR. Début 2000, les autorités du RCD-Goma étaient parvenues à convaincre les Mayi-Mayi de la zone de déposer les armes657.
- Le 5 mars 2000, des Mayi-Mayi pygmées, parmi lesquels des rescapés de la tuerie du 27 février 2000 à Nyemba, ont attaqué le village de Mpende, dans la collectivité du Nord-Kukuga, tuant neuf civils et en blessant six à coup de flèches empoisonnées. Ces Mayi-Mayi venus de Kitengetenge et leur chef Katengu avaient accusé les habitants de Mpende d’avoir aidé l’ANC/APR à tuer quelques jours plus tôt des pygmées ex-Mayi-Mayi. Au cours de l’attaque, les Mayi-Mayi ont aussi incendié plusieurs maisons du village658.
- En mai 2000, des éléments de l’ANC/APR ont tué 11 civils, dont une femme et un enfant, dans les villages de Misimbe et Makuikui de la collectivité du Nord-Lukuga. La tuerie s’est produite à 2 kilomètres du village de Mpende après que des Mayi-Mayi eurent pris en embuscade des éléments de l’ANC/APR basés à Lengwe et Kabeya-Mayi. Après plusieurs échanges de tirs, les Mayi-Mayi ont pris la fuite mais des éléments de l’ANC/APR les ont poursuivis jusqu’aux villages de Misimbe et Makuikui où ils ont tiré sur les civils659.
- Le 10 juillet 2000, à Kalundu, dans la collectivité du Nord-Lukuga, des éléments de l’ALiR ont tué deux civils, dont le chef du village qui avait refusé de les accompagner660.
- En octobre 2000, des éléments de l’ANC ont tué quatre civils, dont un enfant, dans le village de Bulolo du secteur du Sud-Lukuga, dans le territoire de Nyunzu. Les victimes étaient parties récolter du manioc dans leurs champs au village de Bwana lorsqu’elles ont été arrêtées par une patrouille de l’ANC/APR. Après avoir été conduites à Bulolo, les victimes ont été tuées à l’arme blanche et leurs corps brûlés661.
- Le 15 novembre 2000, des Mayi-Mayi ont tué trois civils, dont le chef du village, et en ont blessé un à Kilya après que des villageois furent allés se plaindre auprès du capitaine qui dirigeait les militaires de l’ANC/APR à Nyunzu d’un vol commis par les Mayi-Mayi662.
- Le 3 décembre 2000, des éléments de l’ANC/APR ont tué entre 12 et 16 civils, dont au moins deux enfants, dans la localité de Kasandwe, à 14 kilomètres de Nyunzu. Les militaires étaient à la recherche des éléments de l’ALiR qui avaient tué la veille un civil accusé de collaborer avec l’ANC/APR dans le village de Pilipili, à 7 kilomètres de Nyunzu. Faute de trouver les ALiR impliqués dans cet assassinat, les militaires se sont rendus à Kasandwe. Après avoir accusé la population de collaborer avec les membres de l’ALiR, ils ont tué les civils à coups de pilon et à l’arme blanche puis ont brûlé les corps des victimes663.
- Le 12 décembre 2000, des éléments de l’ALiR ont tué trois civils dans le village de Kalenge, à 8 kilomètres de Nyunzu. Les miliciens avaient reproché aux victimes d’avoir fourni aux militaires de l’ANC/APR des renseignements sur leurs positions militaires664.
- Dans la nuit du 12 au 13 janvier 2001, des Mayi-Mayi et des éléments de l’ALiR ont tué entre cinq et sept civils dans le village de Lipenda et au bivouac de Nathanali, à 6 kilomètres de Nyunzu. Les Mayi-Mayi basés à Lukunde avaient accusé les victimes d’avoir accueilli chez eux des éléments de l’ANC/APR et de leur avoir donné du vin de palme665.
- Le 23 janvier 2001, des éléments de l’ALiR accompagnés de Mayi-Mayi pygmées ont tué sept hommes et dénudé 20 femmes aux environs du village de Biengele, à 2 kilomètres de Nyunzu, sur l’axe menant vers Kongolo. Les assaillants avaient accusé les victimes d’avoir fourni des vivres aux troupes de l’ANC /APR666.
Malemba Nkulu
- Dans la nuit du 19 au 20 juillet 1999, des éléments de l’ANC/APR ont tué au moins onze civils, dont sept enfants, dans le village de Kasala de la chefferie de Museka, dans le territoire de Malemba Nkulu. À leur arrivée à Kasala, les militaires ont menacé les occupants d’une maison de les tuer s’ils ne leur donnaient pas de l’argent. Ils ont ensuite mis le feu à la maison et tiré sur les occupants. Sept civils, dont quatre enfants sont morts le jour même. Trois enfants âgés de quatre, six et huit ans ont été très gravement brûlés et sont morts quelques jours plus tard667.
- Entre 1999 et 2001, des éléments de l’ANC/APR ont tué au moins 52 civils à Mulongo, dans le territoire de Malemba Nkulu. Les personnes surprises alors qu’elles traversaient le fleuve Congo pour se rendre de la rive gauche occupée par les FAC et les Mayi-Mayi sur la rive droite contrôlée par l’ANC/APR étaient accusées d’être des Mayi-Mayi et systématiquement tuées. Les corps de certaines victimes ont été jetés dans des puits668.
Territoire de Pweto
- Le 24 novembre 2000, des éléments des FAC ont exécuté sommairement neuf personnes, dont l’un des fondateurs de l’AFDL, le commandant Anselme Masasu. Arrêtées à Kinshasa fin octobre, les victimes ont été détenues pendant plus de deux semaines dans le bâtiment GLM à Kinshasa dans des conditions cruelles, inhumaines ou dégradantes. Le 21 novembre, en compagnie d’une quarantaine d’autres personnes accusées de préparer un coup d’État contre le Président Kabila, elles ont été transférées dans les cachots de l’ANR à Lubumbashi. Le 22 novembre, les victimes et les autres accusés ont été emmenés jusqu’au village de Cantonnier, à une vingtaine de kilomètres de la ville de Pweto. Après avoir été condamnées à mort au terme d’un procès expéditif par la Cour d’ordre militaire qui siégeait à Cantonnier pour l’occasion, les victimes ont été fusillées. À la suite de la diffusion par l’ASADHO, le 2 décembre, d’un communiqué de presse concernant l’affaire, plusieurs activistes des droits de l’homme ont été arrêtés au début de 2001. Le responsable de l’ASADHO au Katanga a été détenu arbitrairement et torturé pendant plusieurs mois dans le bâtiment GLM669.
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